Air Algérie supprime le français de sa communication officielle, y compris sur ses billets d’avion et ses réseaux sociaux. Une décision stratégique qui marque un tournant culturel et commercial.
Après avoir banni le français de ses billets d’avion, Air Algérie supprime désormais toute trace de la langue de Molière sur ses plateformes numériques. Une orientation linguistique assumée qui interroge, à l’heure où la compagnie nationale s’ouvre à de nouveaux partenariats et marchés internationaux.
Air Algérie supprime le français, la décision est désormais actée, visible et assumée. Un an après l’annonce de sa volonté de s’affranchir de la langue française dans ses supports officiels, la compagnie nationale franchit un nouveau cap. Désormais, ses billets d’avion sont exclusivement édités en arabe et en anglais, une orientation qui s’étend aussi à ses réseaux sociaux et à son site internet. Ce choix, bien que stratégique, suscite des interrogations dans un pays où la francophonie demeure culturellement ancrée.
Pourquoi Air Algérie supprime le français
La décision d’abandonner le français s’inscrit dans une dynamique plus large de repositionnement. Air Algérie, confrontée à une concurrence régionale croissante et à un besoin urgent de modernisation, cherche à redéfinir son image à l’international. Le responsable de la division des affaires publiques, Abdelkader Salmi, a justifié ce choix en expliquant qu’il s’agissait d’un alignement sur les standards des grandes compagnies internationales. L’anglais, en tant que langue universelle du secteur aérien, s’imposait naturellement. L’arabe, quant à lui, réaffirme les liens culturels et commerciaux de l’Algérie avec le monde arabe.
Ce changement linguistique n’est donc pas isolé. Il accompagne une série d’annonces stratégiques, ouverture de nouvelles lignes vers l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Sud, signature de partenariats intercontinentaux, et modernisation de l’offre. Dans cette optique, la langue devient un levier de repositionnement autant qu’un symbole de souveraineté.
Le français, écarté de tous les supports officiels
Quelques jours après l’entretien d’Abdelkader Salmi sur la chaîne Echorouk, les internautes ont constaté une transformation concrète, sur la page Facebook d’Air Algérie, le français a complètement disparu. Les publications sont désormais rédigées exclusivement en anglais et en arabe. Même constat sur le site officiel, où l’on ne retrouve plus aucune trace de contenu francophone. Cette transition, sans préavis, a surpris une partie des usagers habitués à consulter les informations en français, notamment ceux issus de la diaspora installée en France.
Ce choix interpelle d’autant plus que la France reste, à ce jour, le premier marché étranger de la compagnie. Une grande partie des passagers – souvent binationaux ou issus de la communauté algérienne – reste attachée à cette langue, perçue comme un pont entre les deux rives de la Méditerranée. Pourtant, Air Algérie semble parier sur une reconfiguration des usages linguistiques, misant sur l’anglais pour s’imposer sur le marché global.
Une volonté de rupture symbolique
Plus qu’un simple changement de langue, cette décision reflète une volonté politique de se distancier de l’héritage colonial français. Elle fait écho à une tendance plus large observée dans plusieurs institutions algériennes ces dernières années, visant à renforcer l’usage de l’arabe et de l’anglais dans les sphères publiques et administratives. La langue devient ici un marqueur de souveraineté, un outil de redéfinition identitaire à l’échelle institutionnelle.
Pour Air Algérie, ce repositionnement est aussi un acte de communication, il s’agit de montrer qu’elle appartient désormais à une dynamique mondiale, arabe et anglophone, tournée vers l’avenir. Si certains y voient une perte de repères pour une partie de la clientèle, d’autres saluent une volonté de modernisation assumée.
Modernisation linguistique et initiatives commerciales
Ce changement linguistique s’inscrit dans une stratégie plus large de conquête du marché. Avec son offre estivale « Otla », Air Algérie a récemment lancé une campagne de promotion ambitieuse, proposant jusqu’à 60 % de réduction pour les membres de la diaspora. Une opération qui a rencontré un succès tel que les billets se sont retrouvés en rupture de stock. Ces actions marketing s’inscrivent dans une logique de reconquête et de fidélisation de la clientèle, en particulier auprès des Algériens de l’étranger.
En parallèle, la compagnie a confirmé qu’elle travaille sur l’ouverture de nouvelles routes vers des destinations stratégiques, notamment en Asie et en Amérique du Sud, où la langue anglaise s’impose comme norme de communication.
La suppression du français par Air Algérie n’est pas un simple ajustement technique, elle s’inscrit dans une vision à long terme, orientée vers l’internationalisation et la redéfinition identitaire. En rompant avec l’héritage francophone, la compagnie prend un risque calculé, espérant capter de nouveaux marchés tout en affirmant une posture politique claire. Reste à savoir si cette transition sera bien acceptée par tous ses usagers, notamment les francophones de la diaspora.