La Green Card suspendue, sans avertissement public, c’est la réalité à laquelle sont confrontés depuis mars 2025 des milliers de réfugiés et de demandeurs d’asile aux États-Unis. L’administration Trump a brusquement arrêté le traitement de leurs dossiers, invoquant un besoin de « vérification renforcée ».
Face à ce silence administratif, deux grandes organisations ont lancé une requête FOIA pour forcer la transparence et comprendre les réels motifs de cette décision. Dans le but de protéger les droits fondamentaux des personnes concernées et à rappeler que l’accès à l’information reste le pilier fondamental de toute démocratie.
La Green Card suspendue
Sans avertissement public, l’administration Trump a décidé de suspendre le traitement des demandes de carte verte déposées par les réfugiés et demandeurs d’asile. Cette décision, révélée par des fuites internes au Département de la sécurité intérieure (DHS), suscite de nombreuses interrogations. Deux grandes organisations ont déposé une demande FOIA pour obtenir des explications claires sur cette mesure qui pourrait impacter des milliers de personnes.
Une suspension discrète et ciblée qui inquiète
Le 25 mars 2025, plusieurs médias américains ont révélé que le gouvernement Trump avait ordonné la suspension du traitement des demandes de carte verte (green card) déposées par les personnes bénéficiant du statut de réfugié ou d’asile aux États-Unis. Cette décision, confirmée à demi-mot par un haut responsable du Department of Homeland Security (DHS), a été justifiée par la nécessité de mettre en œuvre une procédure de « vérification renforcée » demandée par l’administration, suite à un décret présidentiel daté du 20 janvier.
Aucune communication officielle n’a été publiée sur les sites du DHS ou de USCIS, l’agence en charge de traiter ces demandes. Le flou entretenu autour de cette suspension a entraîné une vive inquiétude parmi les demandeurs concernés et les associations qui les accompagnent.
Une demande FOIA pour forcer la transparence
Face à ce manque d’information, l’American Immigration Council et l’American Immigration Lawyers Association (AILA) ont déposé, le 8 avril 2025, une demande d’accès à l’information (FOIA). Leur objectif : contraindre les autorités à divulguer les documents internes liés à cette suspension, les instructions données aux agents, les critères de la nouvelle procédure de « vérification renforcée », ainsi que les raisons précises pour lesquelles seuls les réfugiés et les asylees ont été ciblés.
Cette démarche vise à lever le voile sur une politique aux conséquences humaines et juridiques profondes, prise sans débat public ni justification cohérente, alors même que les personnes concernées ont déjà subi un long parcours de contrôle et de validation.
Qui sont les demandeurs concernés par cette suspension ?
Les réfugiés et les asylees sont des personnes reconnues comme ayant un besoin urgent de protection, car elles risquent la persécution dans leur pays d’origine en raison de leur race, religion, opinions politiques, nationalité ou appartenance à un groupe social.
Avant même d’entrer aux États-Unis, les réfugiés passent par un processus de sélection extrêmement rigoureux, impliquant des vérifications de sécurité, des empreintes digitales, des entretiens multiples et une évaluation poussée par plusieurs agences. Les asylees, eux, obtiennent ce statut après leur arrivée sur le sol américain, suite à une procédure devant un tribunal de l’immigration ou via une demande auprès de l’USCIS.
Une fois ce statut accordé, la loi permet à ces personnes de déposer une demande de carte verte un an après leur entrée ou la reconnaissance de leur statut. Il s’agit d’une étape essentielle dans leur intégration et stabilisation légale, leur permettant d’accéder à une résidence permanente, et, à terme, à la citoyenneté américaine.

Un ciblage politique déguisé ?
Les conséquences de cette suspension sont immédiates et lourdes. En janvier 2025 seulement, 92 424 demandes de carte verte ont été déposées, dont plus de 12 000 par des réfugiés ou des bénéficiaires d’asile. Avant la suspension, ces demandes mettaient déjà plus de 14 mois à être traitées en moyenne. Ce gel administratif risque désormais de créer un embouteillage massif, retardant encore davantage l’accès à un statut légal stable pour ces milliers de personnes.
L’incertitude est totale : aucune date de reprise n’a été annoncée, et le DHS n’a pas précisé si cette mesure s’appliquait uniquement aux nouvelles demandes ou aussi à celles déjà en traitement. Ce flou juridique met les demandeurs dans une situation de vulnérabilité administrative et psychologique extrême.
Le prétexte invoqué par l’administration Trump – celui de renforcer la sécurité par un nouveau processus de « vérification approfondie » – laisse perplexes les associations de défense des droits humains. Ces populations ont déjà fait l’objet d’un criblage intensif. Pourquoi viser à nouveau des personnes qui ont été jugées dignes de protection par les États-Unis eux-mêmes ?
Le silence des autorités alimente les soupçons d’un ciblage politique, dans la lignée d’autres décisions controversées prises depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. La crainte grandit que cette suspension ne soit qu’une étape vers un durcissement plus large de la politique migratoire, affectant même les procédures humanitaires historiquement protégées.
Qu’en est-il de la loterie américaine de la green card ?
Bien que cette suspension de la green card concerne les réfugiés et demandeurs d’asile, de nombreux internautes s’interrogent sur une possible extension de cette mesure à d’autres voies d’accès à la carte verte, notamment la très populaire loterie américaine. À ce jour, aucune annonce officielle ne mentionne de changement concernant ce programme, également connu sous le nom de Diversity Visa Program.
Toutefois, l’ambiance générale d’opacité et de durcissement des critères suscite des inquiétudes légitimes quant à la suite. D’autant plus que le programme de loterie est souvent instrumentalisé politiquement, certains responsables accusant ses bénéficiaires d’être insuffisamment contrôlés.
La suspension brutale du traitement des demandes de carte verte déposées par des réfugiés et asylees constitue un coup dur pour les principes humanitaires du système d’immigration américain. Elle révèle une volonté de resserrer l’accès à la régularisation, même pour ceux qui ont fui la guerre, la répression ou la torture.
Tant que le DHS et l’USCIS ne communiqueront pas ouvertement sur la portée réelle de cette suspension et sur son calendrier, l’inquiétude ne pourra que grandir. Pour les milliers de demandeurs concernés, c’est bien plus qu’un simple report administratif : c’est un blocage dans leur parcours de reconstruction, de sécurité, et d’appartenance.
Suspension pour les plus vulnérables, visa premium pour les plus fortunés
Tandis que des milliers de réfugiés et de demandeurs d’asile voient leur demande de carte verte brutalement suspendue, un autre programme migratoire, lui, s’ouvre en grand : la “Gold Card”. Lancée par Donald Trump en avril 2025, cette nouvelle carte de résident permanent est réservée aux étrangers capables d’investir 5 millions de dollars dans l’économie américaine. Un contraste saisissant.
D’un côté, l’administration freine, bloque ou rejette les dossiers de personnes venues chercher protection, souvent après des parcours de vie marqués par la guerre, la répression ou l’exil. De l’autre, elle propose un accès rapide, simplifié et valorisé à la résidence permanente, mais uniquement pour les profils fortunés.
Ce double mouvement, durcissement humanitaire et libéralisation élitiste révèle un tournant une nouvelle approche dans la politique migratoire américaine, celle d’une immigration à deux vitesses, où la capacité à contribuer financièrement prime désormais sur le besoin de protection ou les attaches familiales. La “Gold Card” devient ainsi le miroir inversé de cette suspension, là où certains sont bloqués pour des raisons de sécurité, d’autres sont accueillis pour leur capital.
Pour les défenseurs des droits humains, ce projet creuse un fossé entre riches et pauvres, entre “immigration de classe mondiale” et exclusions massives. Et si le programme venait à se concrétiser, il pourrait révéler au grand jour une Amérique à deux vitesses, où le rêve américain ne s’achète plus avec du travail ou du temps… mais avec un chèque.