Alors que le cours de l’euro atteint le seuil symbolique de 260 dinars algériens sur le marché parallèle, l’écart avec le taux officiel s’accroît de jour en jour. Ce phénomène est révélateur d’une tension sur l’accès aux devises en Algérie, incitant les citoyens à se tourner massivement vers le marché parallèle pour leurs besoins en devises.
Les cambistes opérant sur la place de change du square Port-Said d’Alger ont observé une forte montée des prix au cours des derniers jours au regard de l’évolution du taux de change. Ce samedi 26 avril 2025, le taux de change est de 26 000 dinars à la vente, ce qui permet d’acquérir un montant de 100 euros. Mais ce montant très exposé montre bien les tensions sur le marché concernant la disponibilité des devises.
Cette augmentation du taux de change sur le marché parallèle s’effectue dans un cadre où l’accès aux devises demeure fortement restreint tant pour les particuliers que pour les entreprises. Faute d’un marché bancaire bien approvisionné, la demande s’achemine massivement vers le circuit informel.
Quand l’euro atteint le seuil symbolique de 260 DZD
L’écart entre les taux officiels et ceux observés dans la sphère informelle devient de plus en plus flagrant. Alors que l’euro s’affiche à 150,46 dinars algérien sur le marché interbancaire, il dépasse désormais 260 dinars algérien à la vente sur le marché non officiel. Une différence de plus de 70 %, qui souligne à quel point l’économie informelle, notamment au square d’Alger, ce point névralgique du marché parallèle, prend le relais face aux limites du système officiel.
Par ailleurs, le dollar américain suit une tendance similaire, il s’échange à 132,46 dinars algériens au taux officiel, contre 236 dinars algériens dans le circuit non réglementé. Il en va de même pour la livre sterling qui affiche un taux officiel de 176,43 DZD, tandis que dans le secteur informel, elle se négocie autour de 300 dinars. Cet écart persistant contribue à une véritable dualité monétaire dans le pays, avec deux réalités économiques. Pour beaucoup d’Algériens qui veulent voyager, importer ou même épargner en devises, cette place des changes n’est pas un choix, mais le seul recours qui reste à leur disposition, malgré son illégalité.
Les devises étrangères sous tension
L’euro n’est pas la seule devise à flamber. Plusieurs autres devises étrangères affichent des taux en nette progression sur le marché non officiel. Voici un tour d’horizon des principales monnaies ce 26 avril 2025, toujours selon les taux relevés au square Port-Said :
- Dollar US : 236 DZD à la vente, 234 DZD à l’achat
- Livre sterling : 300 DZD à la vente, 296 DZD à l’achat
- Dollar canadien : 162 DZD à la vente, 158 DZD à l’achat
- Franc suisse : 275 DZD à la vente, 273 DZD à l’achat
- Dinar tunisien : 76,5 DZD à la vente, 75,5 DZD à l’achat
- Dirham des Émirats : 62 DZD à la vente, 61,5 DZD à l’achat
Ce panorama illustre la pression constante qui pèse sur le dinar algérien dès lors qu’il s’agit d’échanger contre des devises étrangères. Les devises moins célèbres telles que le yuan chinois ou le riyal saoudien évoluent également dans cette même large tendance haussière depuis le début de l’année ; respectivement, elles sont échangées à 31 DZD et 60,5 DZD au sein du marché informel.
Une demande soutenue par les voyages, le commerce et l’épargne

La hausse des devises sur le marché informel trouve plusieurs explications ; la volonté d’accumuler des devises ne fait qu’augmenter, qu’il s’agisse de voyages à l’étranger, de transferts de fonds ou des paiements des importations. Les besoins en monnaies étrangères sont constants. Entre une offre limitée dans le système bancaire et une demande qui ne cesse de croître, le marché parallèle des devises s’avère être le seul à pouvoir faire face.
Par ailleurs, les tensions géopolitiques récurrentes, notamment une situation économique incertaine d’une part, et une instabilité des taux de change d’autre part, amènent aussi les ménages à penser à convertir leur épargne en devises, comme le souligne l’euro qui est souvent envisagé comme une valeur refuge dans un contexte national incertain.
Un marché parallèle de plus en plus encadré et influant
Si autrefois les échanges informels se faisaient dans la discrétion, le marché non officiel des devises et des changes est devenu une véritable place financière parallèle, dotée aujourd’hui de ses propres acteurs, de ses marges et de ses propres règles. Les cambistes opèrent à ciel ouvert dans des lieux bien connus, et les écarts entre prix d’achat et de vente sont clairement définis : par exemple, 200 dinars de marge entre le rachat (25 800 DA pour 100 euros) et la revente (26 000 DA).
Cette situation met donc en lumière un système parallèle qui pallie, en effet, les insuffisances de l’offre officielle, mais également une tension latente sur la politique monétaire nationale qui doit composer avec une économie duale de plus en plus complexe à réguler.