Issad Rebrab, fondateur du groupe Cevital et homme le plus riche d’Algérie, a vu sa fortune s’effondrer en un temps record. Selon la mise à jour de Décembre 2024 du classement Forbes, sa fortune personnelle s’établit à 2.5 milliards de dollars alors qu’elle était de 5,1 milliards de dollars en 2021, soit une perte de 2,5 milliards.
Cette baisse vertigineuse de la fortune de Rebrab s’explique par une série de facteurs économiques, managériaux et politiques dont le plus marquant reste son retrait forcé de la direction de Cevital, la plus grande entreprise privée d’Algérie. Issad Rebrab, fondateur du groupe Cevital et l’homme le plus riche d’Algérie, a vu sa fortune personnelle s’effondrer depuis 2023, avec une perte estimée à 2,1 milliards de dollars en seulement un an. Classé autrefois dans le top 5 des personnalités économiques les plus riches d’Afrique, Rebrab a connu un déclin rapide, ce qui le fait dégringoler au 11e rang des milliardaires africains selon le classement Forbes 2024, conséquence directe d’une combinaison de problèmes judiciaires, et d’échecs stratégiques dans ses projets internationaux.
Chronologie de la chute d’Issad Rebrab
Conjoncturellement, la chute de Rebrab est intimement liée à ses démêlés avec la justice algérienne. En mai 2023, un tribunal algérien lui a interdit d’exercer toute activité commerciale ou de gestion au sein de son propre groupe, le contraignant à transmettre la gestion de Cevital à son fils Malik. Cette décision judiciaire découle de plusieurs accusations portées contre Rebrab, notamment des soupçons de corruption et des transactions irrégulières avec des entités étrangères.
Rebrab, qui avait déjà passé huit mois en prison en 2019 pour des accusations de surfacturation d’équipements dans sa filiale EvCon, se trouve à nouveau pris dans les filets judiciaires, cette fois-ci de manière plus durable. L’interdiction prononcée par le tribunal de Sidi M’Hamed en 2023 le met complètement dans l’incapacité d’exercer aucune activité managerielle au sein du groupe qu’il a lui-même fondé, ce qui a mené à une transition cruciale dans la direction de Cevital.
Echec du groupe Cevital à l’international
Cette interdiction a été un coup dur pour le groupe, car elle a interrompu plusieurs de ses projets stratégiques et a affaibli la position de Rebrab face au marché. Ses démêlés avec la justice ont également miné la confiance des investisseurs étrangers, qui hésitent désormais à collaborer avec un groupe privé perçu comme étant épinglé par la justice.
Si les problèmes judiciaires ont lourdement pesé dans la chute de Rebrab, les échecs internationaux de Cevital ont également contribué à son déclin. En 2014, le groupe Cevital avait racheté l’entreprise Brandt en France, une acquisition vue comme un jalon majeur dans la stratégie d’internationalisation du groupe. Cependant, l’ambitieux projet de construction d’une usine en Ardèche, estimé à 200 millions d’euros, à été bloqué par des obstacles administratifs et financiers pour finir par tomber à l’eau.Le blocage de ce projet a non seulement entravé la croissance de Cevital en Europe, mais il a aussi contribué à l’épuisement des ressources financières du groupe, précipitant la chute de la fortune de Rebrab.
Un autre facteur est l’échec de l’internationalisation de l’entreprise. Cevital est un conglomérat diversifié, opérant dans des secteurs allant de l’agroalimentaire à l’électroménager en passant par l’acier. Cependant, 60 % des revenus de l’entreprise proviennent toujours de l’Algérie, un marché particulièrement volatile.
En 2023, la baisse des dépenses publiques et les réformes économiques ont créé un climat peu propice à l’expansion, ce qui a affecté directement les revenus de Cevital. Malgré ses ambitions internationales, Cevital reste largement dépendant du marché algérien. La chute des prix du pétrole, principal moteur de l’économie algérienne, a réduit les marges de manœuvre du gouvernement pour soutenir les grandes entreprises locales.
Le ralentissement économique a affecté directement les opérations industrielles de Cevital, en particulier dans les secteurs de l’agroalimentaire et de l’acier, qui sont fortement dépendants des fluctuations des prix des matières premières. Avec la baisse des dépenses publiques et la diminution des subventions, l’entreprise a dû faire face à une réduction des commandes et de la rentabilité.
Malik Rebrab peut-il redresser la barre ?
Depuis juillet 2022, Malik Rebrab, fils aîné d’Issad, est à la tête de Cevital, suite à l’interdiction judiciaire imposée à son père. La mission de Malik est ambitieuse, il doit redresser Cevital dans un contexte économique tendu et face à des attentes élevées de la part de l’héritage familial. Bien que jeune et dynamique, Malik doit prouver sa capacité à moderniser l’entreprise, notamment en restructurant des secteurs phares comme la production de sucre ou les appareils électroménagers avec Brandt en France. Cependant, depuis son arrivée, aucun signe de relance n’a été observé. Le groupe continue de souffrir d’un manque de direction claire et n’a annoncé aucun nouveau projet majeur.
Malik a hérité de l’entreprise dans une période de troubles, malgré ses fondations solides, elle est fragilisée par la stagnation des affaires. Depuis sa nomination en tant que PDG, l’héritier fait face à des défis importants pour redresser Cevital. Contrairement à son père, figure visionnaire et entrepreneur infatigable, Malik peine à relancer l’entreprise, particulièrement après les récentes turbulences économiques et politiques. L’enjeu est d’autant plus crucial que le jeune Rebrab doit aussi assurer une transition générationnelle réussie, un défi que de nombreux conglomérats familiaux rencontrent à travers le monde.
Le fait que Cevital reste largement centré sur des secteurs traditionnels tels que l’acier et l’agroalimentaire soulève des questions quant à la capacité d’innovation et de diversification du groupe sous sa direction.Il fait face à des défis de taille, comme la modernisation des infrastructures et la gestion de certains projets controversés, notamment l’usine de Sétif, qui, bien qu’innovante, a suscité des réactions mitigées en raison de ses coûts élevés. La question qui demeure est, Malik Rebrab sera-t-il capable de restaurer la grandeur de l’entreprise familiale, ou la chute de fortune de son père marquera-t-elle la fin de l’hégémonie de Cevital ?
L’impact de la chute de la fortune de Rebrab
La chute de la fortune de Rebrab a des répercussions bien au-delà de sa famille. Cevital, en tant que plus grand employeur privé d’Algérie, joue un rôle clé dans l’économie nationale. Avec plus de 18 000 employés, le ralentissement des activités du groupe pourrait avoir un effet domino sur l’économie locale· De nombreuses PME algériennes dépendent directement ou indirectement de Cevital, et la fragilisation du groupe risque d’aggraver la situation de ces entreprises
En outre, le ralentissement de Cevital affaiblit la capacité de l’Algérie à attirer des investissements étrangers. Issad Rebrab était souvent perçu comme un pionnier de l’entrepreneuriat algérien, facilitant la conclusion de partenariats internationaux. La stagnation actuelle de l’entreprise ébranle cette perception et limite les opportunités pour d’autres entreprises algériennes de suivre son exemple.
En un an, la fortune d’Issad Rebrab a fondu de 2,1 milliards de dollars, marquant l’une des plus grosses pertes de richesse dans le classement des milliardaires africains en 2023 du prestigieux classement Forbes. Les causes de cette chute sont multiples, allant des problèmes judiciaires à la mauvaise gestion des projets internationaux. Aujourd’hui, Cevital se trouve à un carrefour décisif. Si Malik Rebrab parvient à relancer l’entreprise, elle pourrait regagner sa place dominante dans le secteur privé algérien. Mais sans une stratégie claire et une diversification des activités, le groupe pourrait continuer à perdre de l’influence et des parts de marché.