Le marché noir des devises en Algérie est en effervescence en ce début d’année 2025. L’euro, monnaie de référence pour de nombreux échanges commerciaux et personnels, atteint presque 260 dinars sur ce marché parallèle. Cette flambée des cours aura des conséquences directes sur les citoyens.
Après une courte accalmée, l’euro connaît une hausse rapide sur le marché noir des devises en Algérie. En janvier 2025, il s’approche de la barre symbolique des 260 dinars, un niveau historique qu’il a atteint en décembre. En comparaison, le taux de change officiel, fixé par la Banque d’Algérie, reste largement inférieur, creusant un fossé préoccupant entre les deux marchés.
Ce dimanche 12 janvier, la monnaie européenne s’échange contre 252 dinars algériens à l’achat et contre 256 dinars algériens à la vente, l’euro pourrait atteindre la barre des 260 dinars dans les prochains jours. Cette montée n’est pas le fruit d’une simple spéculation. Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
- Un déséquilibre entre l’offre et la demande : La demande de devises dépasse largement l’offre disponible sur les marchés officiels.
- Une confiance réduite dans la monnaie nationale : Le dinar continue de perdre de sa valeur face aux principales devises internationales, accentuant la pression sur le marché parallèle.
- Une réglementation limitée : Les limitations imposées sur l’accès aux devises étrangères incitent les citoyens à se tourner vers des canaux non officiels.
Le retard dans l’allocation touristique, un facteur clé
L’un des principaux éléments ayant favorisé cette flambée est le report de l’allocation touristique. Initialement prévue pour novembre 2024, cette mesure devait permettre à chaque citoyen de bénéficier d’un montant de 7500 euros pour leurs déplacements à l’étranger. Cette initiative avait pour objectif de limiter les transactions sur le marché noir et de régulariser l’accès aux devises étrangères.
Cependant, le retard dans sa mise en œuvre a eu des effets inverses. En créant une pénurie artificielle de devises sur le marché officiel, cette situation a renforcé la dépendance des citoyens au marché noir. Résultat : une augmentation de la demande sur ce marché parallèle, où les agents informels ont profité de l’occasion pour imposer des taux de conversion exorbitants.
L’augmentation de l’allocation touristique, perçue comme une opportunité par la population, aurait pu freiner la spéculation et réduire l’écart entre les deux taux de change. En revanche, son absence a amplifié les difficultés d’approvisionnement et accru les inégalités d’accès à la devise européenne.
Les conséquences pour les citoyens et l’économie
Augmentation du coût de la vie
La dépréciation du dinar face à l’euro a un impact direct sur le pouvoir d’achat des Algériens. Une grande partie des biens de consommation, y compris les produits de première nécessité, est importée. Lorsque le coût des devises augmente, les prix de ces produits sur le marché local suivent la même tendance.
Les ménages à revenus modestes sont les plus durement touchés, car ils consacrent une part importante de leur budget à des produits de base dont les prix sont désormais inabordables. En parallèle, les entreprises importatrices voient leurs coûts exploser, ce qui se répercute sur les consommateurs finaux.
Pression sur les petites entreprises
Les PME et les commerçants, souvent dépendants des importations pour leurs activités, font face à une double peine : des coûts d’approvisionnement en hausse et une concurrence accrue avec le marché informel. Certaines entreprises, incapables de s’adapter à ces nouveaux prix, risquent la faillite, ce qui pourrait entraîner une augmentation du chômage.
Évasion de devises et économie parallèle
Le marché noir des devises semble échapper au contrôle étatique, Les transactions effectuées dans ce cadre ne contribuent pas aux recettes publiques et affaiblissent l’économie formelle. De ce fait, l’argent qui circule sur ce marché alimente une économie souterraine florissante, difficile à réguler.
En outre, cette situation favorise une évasion des devises vers l’étranger, diminuant encore davantage les réserves de change du pays.
Des solutions à court et long terme
Réformes du système de change
Pour réduire la pression sur le marché noir, une réforme du système de change est requise. Cela inclut une meilleure régulation des allocations en devises et une adaptation des taux de change officiels pour les rendre plus compétitifs. L’objectif est de limiter l’attractivité du marché parallèle en offrant une alternative viable.
Diversification de l’économie
Le développement de secteurs tels que l’agriculture, l’industrie ou le tourisme pourrait générer de nouvelles sources de revenus en devises et renforcer la résilience de l’économie. Sachant que l’Algérie est l’un des principaux producteurs de gaz au monde, représentant sa ressource principale.
Soutien aux ménages et aux entreprises
Face à la hausse du coût de la vie, des mesures de soutien pour les ménages les plus vulnérables sont à considérer. Cela pourrait inclure des subventions temporaires sur les produits essentiels ou des aides directes aux entreprises pour compenser l’augmentation des coûts.
Une situation symptomatique d’une économie en transition
L’augmentation du taux de change de l’euro à près de 260 dinars sur le marché noir est bien plus qu’un simple problème de devise. Elle reflète des difficultés structurelles d’un modèle économique reposant sur une seule ressource et d’un système de change vulnérable.
Pour sortir de cette spirale, l’Algérie travaille sur des réformes profondes, non seulement dans la gestion de ses devises, mais aussi dans la diversification de son économie. Si ces mesures sont mises en œuvre avec succès, elles pourraient offrir des perspectives de stabilité à long terme et réduire la dépendance du pays à un marché noir en pleine expansion. En attendant, les citoyens continueront de supporter les conséquences d’une crise monétaire qui affecte tous les aspects de leur quotidien.