Obtenir un visa d’études en France est un objectif partagé par de nombreux étudiants algériens, séduits par la qualité de l’enseignement et la reconnaissance internationale des diplômes français. Cependant, entre les démarches administratives longues et complexes, les refus fréquents, et les exigences financières strictes, le rêve d’étudier en France peut vite se transformer en un véritable parcours du combattant
De plus, les restrictions liées aux accords franco-algériens de 1968 compliquent davantage les procédures, créant des obstacles supplémentaires pour ceux qui espèrent faire carrière ou s’installer en France après leurs études. Quels sont les défis auxquels sont confrontés les étudiants algériens pour obtenir un visa d’études en France et comment surmonter ces difficultés.
Les défis du processus de visa d’études en France
Chaque année, des milliers d’étudiants algériens tentent d’obtenir un visa d’études pour la France, attirés par la qualité de l’enseignement supérieur· En 2023, la France a délivré plus de 10 000 visas étudiants aux Algériens, faisant d’eux la deuxième communauté d’étudiants étrangers en France après les Marocains. Cependant, le chemin pour obtenir ce précieux sésame est loin d’être facile, et la réalité qui attend les étudiants en France est souvent bien plus compliquée qu’ils ne l’avaient imaginé
Dés le début du parcoure les étudiants algériens se heurtent à un processus de prise de rendez-vous pour les visas d’études qui exacerbe encore leur frustration. Les délais d’attente excessifs, couplés à la montée d’un marché noir où des créneaux de rendez-vous sont revendus à prix d’or, compliquent l’accès à ce précieux sésame. Un groupe d’étudiants a récemment lancé une pétition demandant des réformes urgentes pour améliorer ce système, soulignant le besoin de transparence et d’équité.
« Cette situation est inacceptable et ne reflète en rien le bon déroulement du processus de demande de visa promis par VFS Global. Nous nous retrouvons incapables de prendre rendez-vous même après des mois d’attente, transformant une formalité en l’étape la plus contraignante de notre parcours pour étudier en France. Cela nous empêche de planifier correctement nos études et de nous concentrer sur les véritables préoccupations nécessitant notre attention et notre énergie », indique le texte de la pétition. Si ces problèmes persistent, ils envisagent même de changer de prestataire, témoignant de l’importance d’une réponse rapide aux besoins des étudiants.
En 2023, près de 209 000 visas ont été délivrés à des Algériens pour différents motifs, mais près de 100 000 demandes ont été refusées. Beaucoup de ces refus sont jugés injustifiés, sans transparence dans la prise de décision. Des étudiants avec un excellent parcours se voient refuser des visas, tandis que d’autres avec des dossiers plus moyens réussissent à en obtenir.
Comment un Algérien peut il venir étudier en France
Pour pouvoir étudier en France, les étudiants algériens doivent remplir deux conditions essentielles : être accepté dans une université ou une grande école en France et obtenir un visa d’études. Cependant, même après avoir été admis dans une institution française, l’obtention du visa n’est pas garantie. Chaque année, des milliers de candidats voient leur demande de visa refusée, souvent sans raison claire. En 2021, par exemple, 7700 visas étudiants ont été délivrés aux Algériens, mais de nombreux autres candidats ont vu leurs demandes rejetées.
En plus des frais d’inscription aux établissements, qui peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros, les étudiants doivent payer des frais de visa (environ 100 euros) et d’autres coûts annexes. Les demandes nécessitent des mois de préparation et des documents détaillés (justificatifs financiers, logements, projet d’études)· Les familles investissent énormément dans l’espoir de voir leurs enfants accéder à une éducation de qualité en France. Mais lorsque le visa est refusé, tout cet investissement peut être perdu, sans possibilité de remboursement des frais engagés. Environ 40 à 50 % des demandes de visa sont rejetées chaque année, ce qui laisse de nombreux jeunes sans explication claire.
Les principaux motifs de refus de visa
Les refus de visa pour les étudiants algériens souhaitant poursuivre leurs études en France sont souvent liés à une série de facteurs. Parmi les raisons les plus fréquentes, on retrouve l’usage de documents de voyage falsifiés, un motif qui entraîne un rejet automatique. De même, l’insuffisance de ressources financières pour couvrir la durée du séjour en France est un critère rédhibitoire.
Un autre facteur décisif est l’absence d’admission dans une institution académique française, sans laquelle il est impossible d’obtenir un visa étudiant. De plus, des problèmes liés à la santé non traitée ou l’absence de certificats médicaux requis peuvent également mener à un refus. En outre, des antécédents criminels, des risques pour la sécurité nationale ou une non-conformité du projet d’études avec les critères des services consulaires peuvent jouer un rôle important dans la décision d’obtention.
Malheureusement les refus de visa, souvent perçus comme arbitraires, ne sont que la première embûche rencontrée par les étudiants algériens. Même lorsqu’ils obtiennent une admission en France, ils font face à un système consulaire opaque, renforcé par l’accord de 1968. Mais ce n’est pas tout. Ces refus ouvrent également la voie à des pratiques abusives dans certaines écoles.
Le cas de Malha Chabane et d’une soixantaine d’autres étudiants algériens illustre parfaitement les abus auxquels peuvent être confrontés les jeunes Algériens souhaitant étudier en France· Inscrits à l’EDC Paris Business School, ils ont vu leurs demandes de visa rejetées à l’automne 2023, malgré la fourniture de tous les documents requis (admission, justificatifs financiers, hébergement)· Bien que leur rêve d’étudier en France ait été brisé par ces refus, le cauchemar ne s’est pas arrêté là.
Malgré les rejets de visa d’études en France, l’EDC Paris a refusé de rembourser les frais d’inscription, qui s’élevaient entre 2 146 et 4 539 euros par étudiant, totalisant plus de 200 000 euros. Ce montant représente une somme conséquente pour les étudiants qui ont tenté de faire valoir leurs droits en fournissant des justificatifs détaillant le refus de visa. Pourtant, l’école est restée silencieuse pendant des mois, refusant de répondre à leurs réclamations.
Malha et ses camarades se sont retrouvés non seulement sans possibilité d’étudier en France, mais également endettés par des frais d’inscription non restitués. Cette affaire a fait grand bruit dans les médias, et face à la pression, l’EDC Paris s’est finalement engagée à rembourser les étudiants concernés, bien que cela soit arrivé après de longs mois d’incertitude et de silence.
Face à ces pratiques, les étudiants se trouvent doublement piégés. D’un côté, le système consulaire les prive d’une opportunité d’étudier en France ; de l’autre, certaines institutions abusent de leur situation, les acculant financièrement. Yassine, l’un des étudiants concernés, confie : « On m’a exigé de payer les frais d’inscription en un temps record, puis, après le refus de visa, plus personne ne répondait à mes emails. »
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Les galères des étudiants une fois en France
Alors que certains, comme Malha et Yassine, voient leurs espoirs anéantis par des refus de visa et des abus institutionnels, d’autres étudiants algériens (Ils représentent plus de 30 000 étudiants en 2023) décrochent enfin leur chance de rejoindre la France. Leur rêve semble à portée de main, mais derrière l’excitation du départ se cachent des défis souvent insoupçonnés. Trouver un logement, s’adapter à une nouvelle culture, faire face aux coûts de la vie··· ces obstacles les attendent dès leur arrivée. Ce voyage, plein d’ambitions et de promesses, est aussi un parcours semé d’embûches, où tout reste encore à construire.
- Frais de vie élevés : Le coût de la vie en France, surtout dans les grandes villes comme Paris ou Lyon, est un énorme fardeau. Les frais de scolarité, bien que modérés pour les universités publiques, sont accompagnés de coûts de logement exorbitants, de transport et de nourriture. Des exemples concrets illustrent ces difficultés. Fatima, une étudiante en médecine à Paris, explique que les frais de logement (près de 700 euros par mois) et les difficultés à trouver un emploi régulier l’ont plongée dans des dettes. Sans soutien financier, elle a envisagé d’abandonner ses études et de retourner en Algérie.
- Impossibilité de travailler légalement : Contrairement à d’autres nationalités, les étudiants algériens en France rencontrent des restrictions supplémentaires en matière de travail. Bien qu’en théorie ils soient autorisés à travailler 964 heures par an (environ 20 heures par semaine), les règles de travail et les difficultés administratives rendent cette option très difficile. Cela se traduit par des refus fréquents de visa de travail obligeant nombreux nombreux parmi eux de recourir à des emplois au noir, souvent exploités et mal payés.
Kamel, un étudiant en informatique à Lyon, explique qu’il a dû accepter un emploi dans un restaurant, où il travaillait des heures supplémentaires non rémunérées simplement pour survivre. Comme beaucoup d’autres, il a été contraint de travailler dans des emplois non déclarés, souvent précaires, et à des conditions d’exploitation.
Quant à Fatima, étudiante en droit à Paris, raconte que malgré des efforts académiques considérables, elle s’est vu refuser la possibilité de prolonger son séjour· « Le système est injuste », déclare-t-elle· « J’ai tout fait pour réussir, mais les démarches administratives me bloquent. Je vais devoir quitter la France sans diplôme valable ici. »
Pour ceux qui réussissent à terminer leur cursus, un nouveau défi apparaît, obtenir un changement de statut. Les étudiants algériens en France souhaitant rester après leurs études doivent passer par un processus administratif souvent long et incertain. Bien que l’accord de 1968 leur permette de créer une entreprise pour obtenir une carte de séjour, cette voie reste peu accessible à la majorité des étudiants, en raison des coûts et des démarches impliquées
Sofiane, un étudiant kabyle en informatique, a dû payer 2000 euros à un avocat pour faire annuler une obligation de quitter le territoire français (OQTF) après que sa demande de changement de statut ait été rejetée par la préfecture de Bobigny. Ce n’est qu’au bout de six mois qu’il a finalement obtenu gain de cause. Un autre étudiant, Amine, arrivé avec l’espoir de poursuivre un master en économie, a vu son rêve se briser après un refus de renouvellement de son visa pour des raisons administratives floues. Il a dû quitter la France malgré avoir brillamment réussi ses deux premières années.
Ali, étudiant en ingénierie, raconte qu’il a dû refuser une offre de travail car son visa ne permettait pas de prolongation. « Je me sentais trahi. J’avais enfin trouvé un emploi qui correspondait à mes compétences, mais j’ai dû retourner en Algérie », témoigne-t-il·
L’accord franco-algérien de 1968 : Un Obstacle pour les Algériens ?
L’accord franco-algérien de 1968, signé dans un contexte postcolonial, visait à réglementer l’immigration entre les deux pays. Contrairement aux autres étrangers, un Algérien n’a pas besoin de visa pour un séjour de plus de trois mois, mais doit demander un « certificat de résidence », valable un an, que ce soit pour des raisons privées, familiales, d’études ou professionnelles. Il facilite également l’accès à un titre de séjour de dix ans, les Algériens peuvent en faire la demande après seulement trois ans de résidence en France, contre cinq ans pour les autres ressortissants soumis au droit commun, à condition de disposer de ressources suffisantes.
Cependant, cet accord a aussi ses inconvénients, il limite la durée de certains visas et rend le renouvellement des titres de séjour pour ceux qui souhaitent prolonger leur expérience en France tres compliqué. Le but initial de l’accord était d’assurer un retour systématique en Algérie, mais dans la pratique, cela isole ces jeunes en France sans solution durable.
Par exemple, une étudiante ayant changé de cursus pour s’orienter vers la recherche médicale a vu son titre de séjour refusé en raison d’un parcours jugé « incohérent » par la préfecture. Ce manque de flexibilité dans le parcours universitaire, combiné aux restrictions de l’accord franco-algérien de 1968, complique davantage la situation des étudiants algériens qui ne peuvent pas se permettre de modifier leur trajectoire académique sans risquer de perdre leur visa
Caution de retour pour les étudiants algériens en France ?
Récemment, une proposition de caution de retour pour les étudiants étrangers, dont les Algériens, intitulée « prudence de retour » a suscité de vives préoccupations. Cette mesure, adoptée dans le cadre de la loi sur l’immigration fin 2023 impose aux étudiants étrangers de déposer une somme d’argent sur un compte bloqué pour obtenir une carte de séjour temporaire avec la mention « étudiant ». Cette somme ne sera restituée qu’au moment du retour de l’étudiant dans son pays d’origine ou lors d’un changement de statut de séjour, par exemple, pour passer à un titre de séjour « salarié » ou « vie privée et familiale ».
Le montant de cette caution, actuellement sujet à débat, serait compris entre 10 et 20 euros, selon des spéculations, un montant qualifié de symbolique par certains. Ce montant pourrait toutefois être modifié par un texte réglementaire ultérieur. Cette mesure vise principalement à dissuader les étudiants étrangers de rester en France après leurs études, mais elle ne concernerait pas ceux qui souhaitent changer de statut pour travailler en France.
Inspirée du modèle allemand, où les étudiants doivent déposer plus de 11 000 euros sur un compte bloqué, cette version française se veut moins onéreuse mais tout aussi dissuasive pour les étudiants n’ayant pas de solides garanties financières. Le président Emmanuel Macron a même exprimé ses réserves sur ce projet, craignant que cette mesure n’entrave la venue de talents étrangers dont le pays a un grand besoin pour dynamiser son innovation et sa compétitivité internationale. Si cette mesure venait à être mise en place, elle pourrait encore compliquer l’accès aux études en France pour les Algériens, en ajoutant un nouvel obstacle financier.