L’euro enregistre un record spectaculaire, réalisant sa plus forte hausse face au dollar depuis 2015, avec une valeur impressionnante de 2,15 %, un bouleversement inédit sur les marchés des devises, signe manifeste d’une réévaluation du dollar, mais aussi d’un rééquilibre des forces économiques au sein de l’économie mondiale.
En effet, au lendemain de l’annonce des nouvelles taxes douanières par Donald Trump jeudi dernier sous le nom de « Liberation Day », le dollar a et continue de subir une perte de confiance soudaine, permettant à la monnaie européenne d’atteindre un record extraordinaire, enregistrant sa plus forte hausse depuis 2015. Cette flambée de l’euro, inédite dans l’histoire de la monnaie européenne, représente un tournant sur les écrans des marchés des devises, où les interventions monétaires des banques centrales et les incertitudes économiques mondiales modifient la balance des forces entre grandes monnaies.
Durant la journée du jeudi 3 avril 2025, l’euro a connu une performance particulière sur le marché des devises. La monnaie européenne a grimpé de 2,15 % face au dollar en une seule séance, un bond qui n’avait pas été observé depuis 2015. À 1,109 dollar, l’euro a marqué un tournant décisif dans les rapports monétaires internationaux, poussant de nombreux analystes à réévaluer la position des grandes monnaies mondiales.
La raison immédiate de cette flambée réside dans la brutale dévaluation du dollar, dont le recul de 2 % a été causé par un ensemble de facteurs économiques et politiques. Si cette flambée apparaît comme un simple ajustement dans un environnement de marché des devises fluctuant, elle témoigne d’un rééquilibrage général des forces économiques mondiales. En effet, au-delà de l’effet mécanique des taux de change, cette évolution pourrait mettre en avant des transformations de perceptions des investisseurs quant à la stabilité des deux grandes économies mondiales.
Au cœur de ce retournement se trouvent un ensemble de facteurs macroéconomiques qui a fortement influencé le fonctionnement des marchés des devises. À commencer par l’inflation qui ne fléchit pas et les incertitudes liées aux politiques monétaires des États-Unis, qui ont notamment joué un rôle crucial. Bon nombre d’analystes estiment que la Réserve fédérale (FED) pourrait être contrainte de privilégier la croissance au détriment de la lutte contre l’inflation. Un tel choix risquerait de maintenir une pression baissière sur le dollar, ouvrant la voie à une appréciation supplémentaire de l’euro.
L’euro enregistre un record spectaculaire face à un dollar en perte de vitesse
L’envolée de l’euro n’est pas simplement le résultat d’un ajustement ponctuel des taux de change. Elle s’inscrit dans un contexte plus vaste, dans lequel les fluctuations des devises sont révélatrices d’un bouleversement de fond de la perception des investisseurs à l’égard des deux grandes économies du monde. En effet, le dollar américain a été l’actif refuge incontesté durant de nombreuses années. Aujourd’hui, le dollar semble perdre son statut privilégié au profit d’autres devises, dont l’euro.
Cette dynamique a été amplifiée par un repli de l’indice du dollar qui, au lendemain de l’annonce de nouvelles mesures économiques aux États-Unis, a reculé de 2 %. Ces mesures, parmi lesquelles de nouveaux droits de douane créés par l’administration de Donald Trump, ont suscité des inquiétudes sur la santé de l’économie du pays, augmentant davantage les paris sur un affaiblissement plus durable de la devise américaine.
Les investisseurs, percevant désormais un risque accru lié à la politique commerciale américaine, ont rapidement réajusté leurs positions. Cela a entraîné une hausse significative de l’euro, qui a bénéficié d’une réévaluation rapide sur les marchés des changes.
Selon Erik Nelson, macro-stratégiste chez Wells Fargo, le dollar américain « dépendra » directement de la « direction que va choisir la Réserve fédérale ». Il a fait savoir que « Si la Fed donne la priorité à la croissance économique au détriment de la lutte contre l’inflation, alors le dollar pourrait continuer à s’affaiblir », ce qui mettrait en lumière les tensions existantes au sein des politiques américaines partagées entre deux impératifs antagonistes.
Les grandes banques centrales, dont la Banque centrale européenne (BCE), ont également joué un rôle important dans cette évolution. Dans le même temps, lorsque la Fed hésite entre soutenir la croissance et lutter contre une inflation galopante, la BCE pourrait, elle, opter pour une politique plus restrictive. Cette hypothèse, si elle se confirmait, aurait pour effet de favoriser l’euro face à un dollar en repli, d’autant que, dans un contexte d’intérêts européens plus élevés que les américains, la divergence de politique monétaire contribuerait à l’appréciation de la monnaie européenne à court et à moyen terme.
Une pression renforcée sur le dollar
La chute du dollar n’est pas un cas isolé, cela traduit une tendance de fond sur les marchés financiers mondiaux où la confiance dans la monnaie américaine semble diminuer. Certains experts estiment que ce retournement pourrait être le tournant décisif du rapport de forces entre le dollar et l’euro, les investisseurs réévaluent leur choix, étant face à un amenuisement des actifs refuges dans un contexte économique mondial de plus en plus risqué et incertain.
Selon le responsable mondial de la stratégie de change chez Deutsche Bank, George Saravelos, le contexte actuel marque un « changement radical de régime sur les marchés ». La chute du dollar américain incite à un réajustement considérable des positions sur le marché de change, provoquant « une perte de confiance généralisée dans le dollar américain ».
Les tensions géopolitiques, l’instabilité des politiques commerciales américaines et les inquiétudes sur la politique monétaire de la Fed pèsent lourdement sur la confiance des investisseurs. Ceux-ci, cherchant à se protéger des risques potentiels, semblent de plus en plus se tourner vers l’euro, une monnaie qu’ils perçoivent momentanément comme plus stable.
Les répercussions d’un euro fort sur les marchés mondiaux
L’appréciation de l’euro pourrait générer des effets en chaîne sur d’autres marchés financiers. Un euro fort pourrait affecter et modifier les flux internationaux de capitaux, notamment en redéfinissant la répartition des stratégies d’investissements dans les pays européens. En outre, cette dynamique pourrait également influencer les marchés obligataires et les matières premières qui sont fortement sensibles aux variations des taux d’intérêts.
Les marchés boursiers au niveau mondial pourraient également faire l’expérience des conséquences provoquées par cette nouvelle configuration. Les entreprises européennes pourraient en tirer parti à court terme, grâce à la valorisation plus faible de leurs produits à l’export. Mais un euro trop fort pourrait aussi nuire à la compétitivité des exportations européennes, en causant une augmentation significative du coût des biens et des services commercialisés à l’étranger.
Par ailleurs, au vu d’un secteur des cryptomonnaies très sensible aux mouvements de change et aux politiques des banques centrales, de nouvelles fluctuations ne seraient pas à écarter face aux incertitudes sur la politique de la Fed et de la BCE. Mais, il semble bien que l’évolution de l’euro pourrait inciter les investisseurs à explorer des alternatives à l’or et au dollar et à se pencher vers de nouveaux actifs, tels que le Bitcoin (BTC) ou l’Ethereum (ETH).
Par conséquent, le récent rebond que l’euro a enregistré sur le marché des devises n’est pas simplement un mouvement conjoncturel, mais fait partie d’une tendance plus large de réévaluation des puissances économiques mondiales, en lien notamment avec l’incertitude que suscite le dollar ainsi qu’avec les politiques monétaires des plus grandes banques centrales qui sont au cœur des préoccupations des investisseurs. Ce record historique de l’euro, qui incarne un changement majeur dans le cadre des rapports monétaires internationaux, sera surveillé de près par les marchés sur le moyen et le long terme.